L’édito : « Que Son règne vienne ! »
Pour nous qui avons du mal à accepter la moindre autorité, parler de « royauté » en France n’est jamais simple : notre histoire avec les rois est… disons, mouvementée. Et pourtant, c’est ainsi que l’Église couronne notre année liturgique : nous célébrons le Christ Roi de l’univers.
Pour comprendre, revenons à l’Écriture.
En 1 Samuel 8, le peuple d’Israël demande « un roi comme en ont toutes les nations ». Samuel en perçoit aussitôt le danger : demander un roi, c’est risquer de confier à un homme ce qui revient à Dieu. Mais par pédagogie, Dieu accepte cette demande.
Puis vient David. Lui est oint par Dieu (1 Samuel 16, 13) et, par la suite, Dieu conclut avec David une alliance particulière (2 Samuel 7) : « Moi, je serai pour lui un père ; et lui sera pour moi un fils. » De ce lien naît l’attente d’un roi « selon le coeur de Dieu ». Non pas un monarque tout-puissant, mais un roi dont la justice et la fidélité reflètent l’alliance de Dieu avec son peuple. Les prophètes prolongent cette espérance : le roi guérira, il jugera avec droiture et fera advenir la paix véritable.
Quand Jésus vient, il ne cherche pas à instaurer le règne politique que beaucoup attendaient pour résister à l’occupant romain. Il refuse cette façon humaine d’exercer le pouvoir, celle des « chefs » qui « commandent en maîtres ». Et il renverse la norme : « Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur » (Mt 20, 26). Sa manière d’être roi, c’est celle du Serviteur : Soigner, relever, donner sa vie.
S’il accepte d’être appelé Roi au moment de sa Passion, ce n’est pas pour établir un pouvoir terrestre, mais pour montrer la vraie royauté : celle du don total de soi et de l’amour plus fort que la mort. Devant Pilate, il dira que son royaume « n’est pas de ce monde » (Jn 18,36). L’inscription placée sur la croix, destinée à la dérision, devient paradoxalement le signe de sa véritable royauté.
En célébrant le Christ Roi, nous reconnaissons en lui le seul roi qui ne domine pas mais qui délivre ; le seul roi qui ne prend pas mais qui se donne ; le seul roi dont le règne ne s’impose pas, mais se reçoit.
Que son règne grandisse en nous : règne de paix, d’amour et de vérité. Que son règne vienne.
Père Séraphin de Fombelle
23 novembre 2025 CHRIST, ROI DE L’UNIVERS Solennité
